101. ENCYCLOPÉDIE : LA FORCE DU RIEN
L’homme a toujours eu peur du vide. Nommé « Horror Vacui » par les Latins, le vide était même considéré comme une notion de pure terreur par les savants de l’Antiquité. L’un des premiers à parler de l’existence du vide est Démocrite qui, au Ve siècle av. J.-C., écrit que ce qui nous semble être de la matière est composé de particules en suspension dans le vide. Cette idée est balayée par Aristote qui note : « La nature a horreur du vide » et qui rajoute même : « Le vide n’existe pas. » Il faudra attendre 1643 pour que l’Italien Evangelista Torricelli, reprenant une idée de Galilée, mette en évidence l’existence du vide avec une expérience complexe.
Il remplit un tube de 1,30 m de mercure, puis le retourne, extrémité bouchée, dans une cuve de ce même métal liquide. Il observe alors qu’en haut subsiste un espace créé par la descente du mercure, mais que cet espace est vide puisque l’air n’a pu y pénétrer. Le premier, Torricelli réalise ainsi un vide permanent. Il reproduit l’expérience et, voyant que la hauteur change, en conclut que les variations de volume de la zone dépendent de la pression atmosphérique.
De cette manipulation fut déduit le « baromètre », tube de mercure mesurant les variations de pression de l’air.
En 1647, un physicien allemand, Otto von Guericke, fabrique la première pompe à vide. Il chasse l’air de deux hémisphères de métal accolés et démontre que deux attelages de huit chevaux ne peuvent dès lors les séparer. Il prouve ainsi que le vide est une force qui peut assembler deux blocs de matière.
Pour les hindouistes, le vide est une notion essentielle de la philosophie. Accéder à la suprême vacuité est l’objectif de la pensée du sage. Et l’on considère que même si ce sont les moyeux qui maintiennent la roue à son axe, c’est le vide entre ces moyeux qui permet à la roue de tourner.
Les physiciens modernes ont désormais pu déduire que 70 % de l’énergie totale de l’univers se trouveraient dans le vide et seulement 30 % dans la matière.
Einstein sera à son tour attiré par la connaissance du vide. Il évoque la présence dans le cosmos d’une masse sombre sans énergie et sans lumière, une entité incompréhensible pour les physiciens qui sera le prochain défi pour la pensée.
Plus tard, les physiciens Planck et Heisenberg étudieront le vide. Un Néerlandais, Hendrik Casimir, en 1948, a l’intuition d’une force émanant du vide : la force de Casimir.
Cette force est si puissante qu’en 1996 la Nasa lancera un projet de fabrication d’un « vaisseau spatial à force de Casimir » considéré comme le premier aéronef capable de sortir du système solaire…
En 2000, Hubble détectera dans le cosmos une masse invisible, « la masse sombre », qui pourrait être la matière contenant le plus d’énergie de l’univers.
Aujourd’hui, l’énergie du vide est considérée comme l’un des domaines de pointe de la recherche en astrophysique.
Une théorie définit même que le vide fabrique de la matière et que ce serait donc de ce « rien » que serait issu le big-bang.
Edmond Wells,
Encyclopédie du Savoir Relatif et Absolu, Tome V.